[Interview] Roshâni partage son “expérience KEXP”

18.02.2025

Lors des dernières Rencontres Trans Musicales, la fameuse radio de Seattle KEXP est à nouveau venue à Rennes pour enregistrer pas moins de quinze sessions live avec des artistes de la programmation. La première d’entre elles sera diffusée ce jeudi 20 février sur sa chaîne YouTube. Pour en savoir plus sur les coulisses de ces sessions, nous avons demandé au groupe suisse Roshâni – qui inaugure cette série – de nous parler de cette expérience très spéciale…

Roshâni est un projet genevois mené par la chanteuse/guitariste Roxane Dumont et la claviériste Inès Mouzoune, déjà venue aux Trans Musicales en 2019 avec le groupe AMAMI. Accompagnées par Yavor Lilov à la batterie, elles fusionnent divers styles et idiomes, créant une pop électronique infusée dans ces différentes cultures. Les paroles en farsi (persan iranien), espagnol et français viennent s’ajouter à des rythmes venus du monde entier, tantôt rock ou disco orientale, tantôt cumbia psychédélique ou dem bow caribéen. Un mezze captivant et dansant dont le public des Trans Musicales a pu se délecter lors de la soirée d’ouverture à la Salle de la Cité en décembre dernier, et que le monde entier pourra découvrir à partir du jeudi 20 février dans leur session KEXP enregistrée quelques heures avant. Le trio suisse a accepté de nous parler de cette expérience, moins d’une semaine avant la publication de cette session… 

Les Trans : Bonjour Roshâni. Alors, cette session KEXP, vous avez pu la visionner avant sa publication ? 

Roxane Dumont : Non ! On a pu écouter l’enregistrement parce que c’est Yavor qui a travaillé sur le mix, donc on connaît le son, mais par contre, la dynamique, l’image, on n’en a aucune idée. On va la découvrir en même temps que tout le monde. On se demandait s’ils allaient nous envoyer quelque chose, mais non, on a juste reçu une date et pour le reste, c’est yalla ! 

Qu’est-ce que ça représente pour vous d’avoir fait cette session ?  

Yavor Lilov : C’est quand même très spécial parce qu’on a découvert énormément de musique grâce à KEXP. Ça représente pour nous un palier presque idéal. On ne s’attendait vraiment pas à le faire aussi tôt, parce que Roshâni, c’est un projet assez récent. Donc pour nous, c’était vraiment quelque chose de particulier. On avait vraiment hâte et on s’est beaucoup préparé pour ça. Moi, personnellement, c’est la deuxième fois que je le fais. Et du coup, ça m’a aussi permis de voir leur évolution. La dernière fois, c’était il y a cinq ans déjà, avec le groupe L’Éclair [dans le cadre des Trans Musicales 2019].  

Et c’est vrai que là, en termes de moyens, de son, de personnel, on sent qu’ils améliorent leur concept continuellement. C’est très inspirant de voir des gens qui sont autant exigeants. C’était aussi très spécial pour nous parce que c’est quelque chose qu’on a toujours beaucoup regardé sur YouTube. 

Roxane : C’était un peu un rêve. Quand il y a eu la programmation aux Trans, on était trop content·es et on se disait : « Ouah, mais si on arrive à faire KEXP, ça serait incroyable ! ». Et quand on a reçu le mail de KEXP, on était là : Ah ! 

Puisque vous connaissez bien les sessions KEXP, est-ce qu’il y en a une en particulier que vous avez beaucoup aimée, au point de la revoir régulièrement ? 

Inès Mouzoune : Pour moi, c’est la session du groupe colombien Combo Chimbita [programmé aux Trans Musicales 2022]. Je ne sais pas trop comment le décrire, c’est trop stylé et je suis assez fan d’eux. J’avais vu leur KEXP il y a quelque temps. C’est une vidéo que je mets souvent chez moi, que je laisse tourner, je fais à manger avec… C’est vraiment au-delà du fait de les voir, juste pour écouter le live. 

Yavor : Moi, c’est un KEXP qui date déjà pas mal, celui de Jacco Gardner. Quand je commençais à jouer de la musique un peu plus sérieusement, c’était vraiment un live que je regardais hebdomadairement, parce que je trouvais ça incroyable. C’est aussi celui-là qui m’a fait découvrir KEXP. 

Roxane : Pour moi, c’était celui de Bomba Estéreo [vu aux Trans Musicales 2010], d’il y a 12 ans. C’est avec cette vidéo que j’ai découvert les live sessions de KEXP. C’est mon number one sur YouTube chaque année. Je le regarde tout le temps. 

Pour revenir à Roshâni : je crois que vous avez enregistré quatre morceaux pour cette session. Ce ne sont que des titres de votre premier disque ou il y a des inédits ? 

Roxane : Il y en a deux qui sont déjà sortis et deux qui sont des nouvelles chansons qu’on n’a pas encore enregistrées en studio, parce qu’on est encore en train de les travailler. On les a jouées un peu comme on le sentait à ce moment-là… C’était marrant parce que quand on a choisi les tracks, on ne savait pas très bien dans quel ordre les jouer. On a pas mal discuté, et on s’est dit : « OK, chacun réfléchit aux chansons qu’il a envie de jouer et demain, on croise nos choix ». Et finalement, la chanson qui marche le mieux en concert, qui est un peu notre “tube” à nous [Donya Do Roozeh], on a décidé de ne pas la jouer parce qu’on a remarqué qu’elle marche aussi beaucoup grâce à la chaleur des gens qui réagissent dans le public. On s’est imaginé la jouer dans une live session comme ça, à froid, et on a finalement fait ce choix de ne pas jouer notre chanson la plus connue.  

Chris Kellogg, le responsable de la programmation de KEXP, nous disait l’an dernier en interview que certain·es artistes étaient particulièrement stressé·es au moment du tournage, et que leur but était donc aussi de créer les conditions pour que les artistes soient le plus à l’aise possible, aussi bien techniquement qu’humainement. Comment vous, vous avez vécu ça ?  

Inès : Personnellement, j’étais assez stressée, mais je ne pense pas que je le montrais beaucoup. Je pense qu’on était tous·tes assez stressé·es mais c’est vrai qu’ils ont été super sympas, sans jamais nous ajouter de pression en plus. Moi, j’étais trop stressée parce que je joue tout en live, les basses, les mélodies, les pads, c’est super rythmique… Si je fais des erreurs, ça peut vraiment se voir et s’entendre. Donc j’avais un peu le poids de cette responsabilité de ne pas ruiner le live. Mais ils nous ont mis super à l’aise. On a même pu faire un ou deux essais. 

Yavor : Nous, on tient beaucoup à ce truc live, mais c’est vrai qu’on est juste trois, et parfois, on joue comme si on était cinq personnes, parce que les filles font deux choses en même temps. Inès, elle fait les basses, la mélodie et les accords. Et Roxane, elle fait la guitare et la voix en même temps.  

Roxane : Oui, c’est vraiment difficile à jouer… donc c’est vrai qu’on était tous·tes les trois bien stressé·es, mais aussi super content·es d’être là. Je me souviens, ils étaient là avec leurs quatre caméras qui étaient magnifiques. Et vu que je chante, ils me regardaient souvent. Il y avait des moments où je les regardais comme ça dans les yeux, ils me faisaient des petits gestes, en mode “tout va bien, ça se passe bien”. Ils étaient vraiment dans le positif. On se regardait beaucoup entre nous comme pour se dire : « on est en train de passer un super moment ensemble, on profite ». On avait notre concert à la Salle de la Cité pour les Trans juste après. Une fois la session terminée, j’étais là, genre, « ouah ! ». En fait, ce n’était que le début parce qu’on avait ce concert après quand même, dans cette belle salle, pour l’ouverture du festival. En fait, ça nous a donné une force de malade. On est arrivé·es au concert, on avait faim. On avait envie. Ça nous a donné beaucoup d’énergie. 

Yavor : Je trouve qu’ils donnent beaucoup de confiance aussi par le fait qu’ils sont super bons avec leurs caméras. L’espace n’est pas énorme mais ils ne se croisent jamais, ils ne se rentrent jamais dedans, ils bougent méga vite. Tout le monde est hyper efficace, tout en restant cool. Je pense qu’ils nous donnent confiance parce que voir des gens avec autant d’expérience, se donner autant pour qu’on fasse ensemble un truc qui est très qualitatif, ça nous pousse aussi à nous donner à fond. 

Roxane : Ce sont aussi des amoureux de musique, je pense que c’est ça qui est chouette. Il y en a qui sont musiciens et ça se ressent. Ils dégagent une certaine énergie et ils sont vraiment attentifs aux détails. Donc oui, je pense qu’il y a cet amour de la musique qui relie tout le monde. 

Yavor : C’est le sentiment qu’on a eu aux Trans de façon générale. 

Roxane : Tous les gens qui étaient à la soirée, le public, ils étaient là pour découvrir de la musique. 

Qu’est-ce que vous attendez de la sortie de cette session ? 

Roxane : J’espère qu’on sera tous·tes les trois fièr·es du résultat. Et si ça plaît aux gens, tant mieux. Si ça permet de toucher un nouveau public, ce serait chouette aussi.  

Yavor : Et si ça peut aussi inspirer des jeunes à aimer la musique jouée en live, je pense que ce serait bon à prendre.  

Inès : Moi, tout ce que j’attends, c’est déjà qu’on soit content·es et fières de ce qui sort, que tout le monde soit content et puis surtout que les gens à qui on n’a pas encore accès, en termes de diffusion de notre musique, puissent la découvrir, tomber sur le band, et puissent se dire “c’est cool” – ou pas d’ailleurs – mais qu’au moins, ce soit accessible. Parce que finalement la musique, on la fait pour qu’elle soit partagée.  

Roxane : Pour la visibilité aussi. Ça peut nous permettre de sortir de notre “petite Suisse”, avec un peu de chance.  

Yavor : Oui, et puis ça nous fait une expérience commune avec énormément de groupes, ça donne des bons sujets de conversation. « Tu avais qui en caméra deux ? Moi, j’avais untel… » 

Et quand vous rencontrerez en festival des groupes que vous ne connaissez pas, certains vous diront peut-être : “On vous connaît, on a vu votre session KEXP aux Trans Musicales !” 

Yavor : Totalement, c’est une carte de visite exceptionnelle ! 

Retrouvez la session KEXP de Roshâni sur la chaîne YouTube de KEXP et sur lestrans.com à partir du jeudi 20 février.

L’actualité de Roshâni
Le trio revient juste d’un séjour de plus de cinq semaines en Colombie où il a pu faire des résidences, collaborer avec des artistes locaux et enregistrer un EP qui sortira vers mai ou juin de cette année. Entre-temps, Roshâni sera retourné en studio pour enregistrer son premier album.
À suivre…