Retour aux Sources : Crows

25.01.2023

James Cox, le chanteur et leader gallois de la formation post-punk britannique Crows, dévoile les influences qui planent sur l’un des meilleurs groupes actuels de rock du Royaume-Uni.

Swamp Heron (2013), de The Cult of Dom Keller

 

« The Cult of Dom Keller est un groupe incroyable de Nottingham. Ils ont sorti cinq ou six albums studio mais ils sont encore peu connus à l’extérieur du Royaume-Uni. L’atmosphère de Swamp Heron combine tous les éléments psychédéliques que nous aimons au sein de Crows. Du début à la fin, la chanson est une sorte de voyage, avec des montées et des descentes. C’est entraînant et très accrocheur. Le riff de guitare et la mélodie restent longtemps dans la tête. Nous nous sommes rencontrés et j’ai eu l’occasion de leur dire à quel point ils nous ont influencés quand nous étions plus jeunes, notamment dans les trémolos de guitare et sur le plan du groove. »

Human Fly (1983), de The Cramps

 

« J’ai découvert The Cramps vers 18 ans quand j’étais la musique à l’Université de Westminster, dans le nord-ouest de Londres, avec Steve (Goddard), le guitariste de Crows. Je ne connaissais que quelques titres alors que lui était un grand fan. La façon de chanter de Lux Interior m’a beaucoup influencée quand j’essayais de trouver ma voix et la façon dont je voulais sonner au début du groupe. J’étais comme hypnotisé par son intonation, sa façon de cracher les paroles et son caractère performatif. A l’origine, on voulait faire du garage rock dans la veine des américains de The Black Lips. C’était le genre de groupes qu’on aimait. Nos premières chansons étaient dans ce style. Mais comme il y avait un million de formations de garage rock au moment où l’on a formé Crows en 2015, on a voulu se différencier en incluant un son psychédélique lourd. Plus jeunes, on était dans une veine plus punk. Je mettais beaucoup de vibrato dans ma voix. Je le fais moins aujourd’hui grâce aux Cramps. »

Misirlou (1962), de Dick Dale and The Del-Tones

 

« Au moment de former Crows, nous avons essayé de définir ce que nous voulions comme son. Dès le début, nous voulions incorporer le style surf music, avoir une grosse réverbération, un gros trémolo. Steve est un incroyable guitariste de surf music. Il a repris des choses ici ou là pour les adapter à des chansons plus modernes avec une structure qui se prête aux refrains, aux couplets et aux ruptures. La musique de Crows est vraiment la concentration de différents genres : garage rock, punk rock, psychédélisme… »

Psychotic Reaction (1966), de Count Five

 

« On a découvert ce morceau sur la compilation Nuggets : Original Artyfacts from the First Psychedelic Era, 1965–1968, sortie en 1972. Elle regroupe des formations rock parfois obscures des années 1960. Psychotic Reaction, de Count Five est un titre génial. C’est l’un des premiers que nous avons repris avec Crows quand on débutait notre aventure ensemble. C’était une idée de Steve. Nous aimons ce genre de rythmique rock basse/batterie avec une utilisation parcimonieuse de la guitare par-dessus. On entend ça aussi au début du morceau Nobody but me de The Human Beinz (1967). C’est un bon exemple de ce qui nous a influencé au début pour le duo basse-batterie. Ce genre de breaks répétitifs qui sert de moteur au morceau mais que l’on hésite pas à rompre pour emmener la chanson dans une autre direction, quitte à revenir ensuite à la première partie. Il est important de créer des variations, inventer une sorte de voyage. »

The Day I Beat My Father Up (1995), de Thee Headcoats

 

« Avec Steve, nous écoutons depuis longtemps les productions de Billy Childish, le leader de Thee Headcoats. C’est un formidable auteur-compositeur. Beaucoup de gens aimeraient posséder son répertoire. Et puis, il a une manière dingue de balancer ses textes. Il a une férocité que j’ai essayé de reproduire. Il possède une telle force de conviction et une telle passion. Ses paroles sont très sombres. On a l’impression qu’il n’invente rien, qu’il chante quelque chose de réel tant il y met ses tripes. Billy Childish n’a probablement pas eu la reconnaissance qu’il mérite. Il rassemble seulement un groupe de fans pur et durs. Cette batterie, cette guitare et  cette voix distordue, The Day I Beat My Father Up est une sacrée bonne chanson punk! Dans les paroles de Crows, je reprends parfois des phrases prononcées par des politiciens britanniques comme Nigel Farage, l’un des artisans du Brexit. J’adapte leurs mots à mon point de vue et leur donne un caractère ironique pour parler de la situation actuelle du Royaume-Uni. C’est très frustrant de vivre en ce moment dans ce pays, donc c’est assez facile pour moi de faire sentir une forme de colère dans ma voix. »

Crows est en concert à l’Ubu le lundi 6 février à 19h.