Retour aux sources : Simony

14.03.2022

Le rappeur Simony (Antoine, de son prénom) percute les esprits avec un flow viscéral porté par des instrus électroniques. Celui qui a été mannequin dans une première vie, dévoile les artistes qui lui ont servi de modèles.

On découvre souvent les artistes sur scène, sur album ou dans un clip. On peut aussi apprendre à les connaître autrement, en s’intéressant aux groupes et aux morceaux qui les inspirent ou les ont inspirés, et qui sont même parfois à la source de leur cheminement musical.

La Mauvaise Réputation (1952) de Georges Brassens

 

« Quand j’étais petit, George Brassens était l’artiste préféré de ma mère et de mon grand-père. On avait les cassettes à la maison. Je connais les paroles de La Mauvaise Réputation par cœur. Brassens était un rappeur avant l’heure. J’aime ses textes bien construits, son insolence. Il y a cette phrase : « Quand j’croise un voleur malchanceux / Poursuivi par un cul-terreux / J’lance la patte et, pourquoi le taire ? Le cul-terreux se retrouve par terre ». Le guitariste allait à l’encontre de la bienséance. C’est la base pour un artiste de braver les codes de la société. »

That’s My People (1998) de NTM

 

« C’est mon oncle qui m’a fait découvrir NTM. Sur le plan humain et artistique, Kool Shen est une référence. J’aime ses trois couplets en forme de leçon de vie. Dans ce morceau, il véhicule des valeurs que j’ai envie de défendre : la famille, celle dont on hérite et celle qu’on se choisit. On est solide quand on est bien entouré. Je suis attiré par ce style de hip hop appelé “boom bap” qui porte un message, une énergie. La révolte se diffuse à travers des textes personnels. L’intime permet de fédérer. C’est ce que j’essaye de faire avec ma musique. »

Fu-Gee-La (1995) de Fugees

 

« En puisant du côté du rap américain, NTM m’a ouvert une porte vers un rap venu d’autres horizons. Même si à l’époque je ne comprends pas les paroles des Fugees, je ressens leur énergie. Dans Fu-Gee-La, il y a cette mélodie incroyable. Et puis ce refrain chanté, la présence d’une femme, c’est novateur. Les Fugees sont des pionniers. Ils ont ouvert le rap à d’autres publics. Ce sont des activistes. Ils défendent la cause des migrants. Ce message qui vient du cœur associé à l’envie de faire kiffer, c’est ma came. »

Volcano (2013) de Woodkid

 

« J’ai découvert ce titre sur YouTube. La plus grande claque que j’ai prise avec un live. J’ai partagé la vidéo avec mes compositeurs, les Rabbits. Ils sont très inspirés par les basses et les percussions, l’impact cinématographique de la musique. Woodkid est un maître en la matière. Ses scénographies sont monstrueuses. Même si on n’a pas les mêmes moyens, on essaye de construire un spectacle où l’on peut exprimer la puissance musicale et théâtrale de nos morceaux. »

Heat (2016) de Sopico

 

« J’ai découvert ce morceau quand j’étais en Chine. J’étais parti dans le cadre de mon cursus en management. Je suis resté 8 mois en Asie. C’est là-bas que j’ai compris que je ne voulais pas devenir consultant mais me plonger dans la musique. J’avais trop besoin de m’exprimer, d’être libre, d’être maître de mon destin. Le mélange de musicalité et de “kickage” de Sopico m’a profondément marqué. Il possède un monde à lui et un champ lexical qui lui est propre. Son écriture singulière s’accorde parfaitement à sa musique. Il m’a donné envie d’écrire de manière plus instinctive, moins carrée. Sopico est un messager de l’âme. Il connecte son cœur à son cerveau. »

L’album Adios Bahamas (2020) de Népal

 

« Népal [décédé en 2019 à 24 ans] a choisi un chemin que j’ai eu peur de suivre un jour. À un moment de ma vie, j’ai établi une distance avec la réalité et j’aurais pu moi aussi opter pour cette forme de fuite. Dans Adios Bahamas, les morceaux Trajectoire et Crossfader incarnent deux émotions de Népal, l’une négative, l’autre positive. Parfois, on est rattrapé par un côté sombre. Mais, j’ai désormais les clés pour ne pas rester enfermé. Il faut continuer à honorer Népal, à le célébrer. Il m’accompagne. J’ai écrit un freestyle : « 3 heures du mat’ je suis dans ma ruche pour ne pas finir aux Bahamas. » Je le placerai sans doute dans mon album. »

Splash (2017) de Disiz

 

« Disiz a cassé les barrières en injectant de l’électro dans le rap. Quand il emprunte une direction, il y va toujours à fond sans se soucier de ce qu’on va dire. Quand tu suis une mode, tu perds toujours. Il ne faut pas s’enfermer dans un format. J’ai adopté la même attitude sur mes titres Fight Club, Full Faya ou le récent Vortex. J’essaye de lier des énergies qui a priori ne sont pas compatibles. Sur Vortex, je me suis par exemple autorisé à mettre de l’Auto-Tune. Avec le temps, j’ai compris comment l’utiliser à bon escient. »

Simony est en concert à l’Ubu le jeudi 24 mars à 20h.